Epilepsie : pour mieux comprendre
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Epilepsie : pour mieux comprendre
Intro : mon grand-père souffrait d'épilepsie, enfant j'ai assisté à de nombreuses "crises", la fille d'une amie souffre d'épilepsie depuis l'âge de ses 8 ans, après une intervention "loupée", elle vit depuis dans un centre spécialisé, elle a 30 ans aujourd'hui. Et je pense aussi à notre Dominique. Alors pouvoir comprendre, comme pour nos troubles, permet de nous éclairer.
Epilepsie
Dossier réalisé en collaboration avec Patrick Chauvel, unité Inserm 1106 "Institut de neurosciences des systèmes"
L’épilepsie est connue depuis l’Antiquité où elle est décrite dans des textes indiens, grecs et romains. Bien que le terme au singulier reste d’usage courant, il serait plus exact de parler d’épilepsies au pluriel, ou de syndrome épileptique, car le trouble a des causes, des mécanismes et des manifestations divers.
L’épilepsie, une maladie multiforme
On appelle aujourd’hui épilepsie la récurrence spontanée de crises épileptiques qui résultent d’une décharge anormale et simultanée de milliers de neurones. Elle se propage dans le cerveau et produit des symptômes caractéristiques et variables selon l’origine cérébrale et la propagation.
Des symptômes très variables selon la localisation
L’origine de la crise épileptique se situe dans la majorité des cas dans le cortex cérébral. Les décharges peuvent variablement activer les systèmes neuronaux de la motricité, des organisations cognitives, des émotions, des systèmes végétatifs, et même des comportements. La diversité des aires cérébrales concernées explique la grande variété des symptômes.
- Une décharge prenant naissance au niveau du cortex moteur dans la représentation de la main se traduira par un raidissement ou des secousses rythmiques du pouce et des doigts et se propagera vers la racine du bras. Il pourra envahir une moitié du corps, voire les deux côtés selon les circonstances. Mais si la décharge démarre dans la représentation sensitive de la main, le sujet ressentira des sensations anormales dans les doigts (fourmillements, picotements), qui pourront de même s’étendre.
© Inserm, CRICM - Plateau MEG/EEG - Inserm U975
Cortex
- Une décharge dans le cortex auditif ou visuel produira des hallucinations ou illusions auditives ou visuelles, dans le cortex olfactif ou gustatif des hallucinations olfactives ou gustatives (mauvaise odeur ou mauvais goût).
- Lorsqu’elle démarre dans des régions corticales dites "associatives" (qui traitent des informations à un niveau plus complexe), la crise peut engendrer des manifestations plus élaborées comme des sensations de lévitation, des hallucinations de musiques ou de scènes visuelles. ; Dans les régions d’un degré hiérarchique encore supérieur, des hallucinations de mémoire (déjà vu, déjà vécu, réminiscences de souvenirs) ou des productions de langage anormales (jargon) peuvent être produites.
- Les crises du lobe frontal (vaste région du cortex où s’organisent les comportements moteurs, en interaction avec les émotions) peuvent entraîner des gesticulations anormales, répétitives, prenant parfois l’aspect de comportements de fuite et de frayeur.
Lorsque les crises se produisent dans les régions associatives ou envahissent très rapidement de larges territoires, elles entrainent une perte de conscience.
Enfin, lorsque la région en cause est sensorielle, certaines crises peuvent être déclenchées par des stimuli précis, comme des feux clignotants, un écran d’ordinateur qui scintille, des bruits soudains…
Des crises, partielles ou généralisées
L’épilepsie n’est pas une maladie en tant que telle mais le symptôme de nombreuses pathologies du cerveau, et du cortex cérébral en particulier. Il existe des crises dites "partielles" ou "focales", qui sont la conséquence d’une lésion cérébrale, et des crises "généralisées", non lésionnelles, qui impliquent des mécanismes plus largement distribués dans le cerveau, notamment d’origine génétique.
Les lésions en cause dans les crises partielles peuvent être de nature très différente : tumeur cérébrale (gliome), lésion secondaire à une privation d’oxygène, lésion post-hémorragique, post-infectieuse (encéphalite, abcès), post-traumatique, ou consécutive à des anomalies du développement du cortex, à des processus immunologiques, etc… Certaines de ces "lésions" ne sont que l’expression locale d’une anomalie génétique.
Les crises généralisées
Une crise dite "généralisée" ou "Grand Mal" est caractérisée par des manifestations cliniques et électriques bilatérales et symétriques. Cette crise motrice, qui est la plus impressionnante, implique l’ensemble de la musculature squelettique et comporte une perte de conscience et des manifestations végétatives. Une autre forme de crise "généralisée" est "l’absence", encore appelée "Petit Mal". Ces crises se manifestent par une brusque rupture de la conscience qui apparaît comme un arrêt de toute activité pendant quelques secondes. Certains types d’absence sont accompagnés de "myoclonies", des secousses musculaires des racines des membres et de l’axe du corps qui peuvent entrainer une chute. Certaines crises généralisées sont en fait secondaires à la propagation dans le reste du cerveau de crises partielles : ce sont des crises "secondairement généralisées".
Une maladie fréquente, survenant précocement
© Inserm, A. Represa-Bermejo
Epilepsie
L’incidence de l’épilepsie se situe autour de 50 cas pour 100 000 habitants dans les pays développés (OMS, Duncan et al 2006), ce chiffre étant plus élevé chez les enfants et les personnes âgées. Dans les pays moins développés, elle peut dépasser les 100 pour 100 000 en raison du manque d’hygiène, des risques plus importants d’infections à effet secondaire neurologique et des systèmes de soin défaillants. En France, 0,6 à 0,7 % de la population est concernée et dans 75 % des cas, la maladie s’est installée avant 18 ans.
L’évolution la plus redoutée est l’état de mal épileptique qui se manifeste par des crises très longues (plus d’une demi-heure) ou très rapprochées (sans reprise de conscience) pouvant aboutir à des lésions neurologiques et mettant en jeu le pronostic vital.
La durée de vie moyenne d’un patient épileptique est légèrement inférieure à celle de la population générale. Une mortalité accidentelle peut être associée à une crise (noyade, chute, accident) et l’épilepsie peut conduire au décès soudain chez les patients souffrant de crises chroniques non contrôlées. La lésion cérébrale primaire peut aussi être à l’origine d’une évolution fatale (en cas de tumeur cérébrale par exemple).
L’épilepsie présente d’autres comorbidités comme une association plus fréquente que la moyenne avec des dépressions. Du fait des déficits cognitifs qu’elle peut induire (troubles de la mémoire dans les épilepsies temporales et frontales), elle peut avoir des conséquences négatives importantes sur le bien-être, l’insertion socioprofessionnelle et la qualité de vie. Ainsi, la prise en charge des patients épileptiques représente un enjeu de santé publique important.
Des formes rares et précoces d’épilepsie
Il existe de nombreuses pathologies se traduisant par des symptômes épileptiques et se manifestant très tôt. Ainsi, le syndrome de West touche le nourrisson avant un an. Il associe des spasmes à divers troubles du développement psychomoteur. Le syndrome de Lennox-Gastaut se déclare un peu plus tard, entre 2 et 6 ans, avec des absences et des crises toniques (avec raidissement soudain et contraction des muscles). Le syndrome de Dravet (épilepsie myoclonique sévère du nourrisson) apparaît dans les premiers mois de l’existence. Dans certains cas, les convulsions fébriles du bébé sans cause connue (comme une méningite ou d’autres infections) peuvent annoncer la survenue plus tardive d’une épilepsie du lobe temporal.
Plusieurs gènes impliqués dans des formes rares de syndromes épileptiques débutant dans l’enfance ont été identifiés. Mais dans la plupart des cas l’origine et le mécanisme exact des troubles restent inconnus.
Causes et facteurs de risque à l’étude
L’épilepsie est une maladie complexe et multifactorielle : elle associe des terrains génétiques et des facteurs environnementaux. On parle d’épilepsies symptomatiques lorsque les crises sont la conséquence d’une lésion identifiable, comme une tumeur ou un
accident
vasculaire cérébral, et d’épilepsies idiopathiques lorsqu’aucune cause n’est mise en évidence.
Des études génétiques et épigénétiques conduites sur des populations de malades comparées à des populations indemnes d’épilepsie sont en cours : elles devraient permettre à terme d’identifier et de classifier les origines moléculaires des différentes formes d’épilepsie, ainsi que leur évolution lors du développement et du vieillissement du patient. On sait déjà qu’il n’existe pas "un" gène de l’épilepsie mais de nombreuses variations génétiques et épigénétiques formant un terrain de susceptibilité.
On sait aussi que les facteurs de risque varient selon les âges et les sociétés. Les traumatismes crâniens, les infections du système nerveux central et les tumeurs peuvent surgir à tous les âges de la vie. Les troubles cardiovasculaires sont plus fréquents avec l’âge et constituent le facteur de risque le plus courant chez les personnes de plus de 60 ans. Dans les pays en développement, des maladies très répandues comme le paludisme produisent un terrain favorable à l’épilepsie. Le mode de vie a aussi son influence sur la survenue des crises chez les patients prédisposés : le faible taux de calcium et de glucose sanguin, le manque de sommeil, la consommation excessive d’alcool, le stress et les émotions violentes ont pu être statistiquement corrélés à des crises plus fréquentes.
Les progrès dans la classification des maladies neurologiques et psychiatriques permettent aujourd’hui de réaliser que les crises d’épilepsie sont fréquentes chez les autistes et les patients atteints de maladie d’Alzheimer, alors que ce fait était totalement ignoré il y a quelques années.
Les mécanismes neurobiologiques de la crise
Les mécanismes neurobiologiques pouvant conduire à une crise sont nombreux et distincts. Beaucoup d’entre eux sont encore mal compris mais leur action finale commune est l’hyperexcitabilité et l’hypersynchronie d’une population de neurones.
Cette excitation simultanée résulte d’une amplification de la transmission neuronale liée à l’action des acides aminés excitateurs comme l’acide glutamique, ainsi qu’à une altération de la transmission inhibitrice liée à un acide aminé inhibiteur : l’acide gamma-amino-butyrique ou GABA).
Certaines épilepsies sont liées à des mutations génétiques altérant des protéines présentes à la surface des neurones et impliquées dans ces transmissions. Par ailleurs, la répétition des décharges successives lors des crises (embrasement ou "kindling") favorise la pérennisation de l’épilepsie. Le cerveau garde la mémoire des crises par l’activation de certains récepteurs à l’acide glutamique (récepteurs NMDA) propres à activer des signaux qui facilitent les réponses ultérieures.
Le diagnostic
© Inserm, CJF 90-12
Epilepsie
Le diagnostic de l’épilepsie est parfois difficile. Certaines crises rassemblent les symptômes les plus classiques de la maladie. D’autres sont plus difficiles à interpréter et peuvent résulter de troubles divers.
Le diagnostic repose sur un interrogatoire et un examen clinique, associés à l’électro-encéphalographie (EEG) et à l’imagerie cérébrale (IRM). L’interrogatoire et l’examen ont pour objectif de situer avec le plus de précision possible le début, la fréquence, le ressenti et les circonstances des crises. L’EEG permet de détecter des anomalies de grande amplitude qui sont les traces d’une activité neuronale anormale. Certaines mises en condition ayant pour effet de rendre les neurones plus excitables (lumière stroboscopique, privation de sommeil) peuvent faciliter l’émergence de ces anomalies.
La démarche diagnostique a deux objectifs principaux : (i) localiser la région épileptogène par l’EEG et les méthodes dérivées, (ii) rechercher et localiser une lésion responsable de l’épilepsie.
L’électroencéphalogramme, utile au diagnostic
L’électroencéphalographie consiste à enregistrer l’activité électrique cérébrale à la surface du cerveau, grâce à des électrodes. Cette technique permet de reconnaître des anomalies appelées « pointes » ou « pointe-ondes » (selon leur forme sur l’électroencéphalogramme), correspondant à la somme des potentiels excitateurs et inhibiteurs de milliers de neurones. Leur aspect, leur fréquence et leur topographie permettent parfois de caractériser leur signification pathologique et, souvent, leur localisation cérébrale. La vidéo-EEG, alliant l’enregistrement vidéo à l’EEG, met en relation la topographie de la décharge avec les symptômes des crises, donnant accès à l’origine anatomique des crises.
Des traitements essentiellement médicamenteux
Les traitements des épilepsies sont dans la grande majorité des cas, médicamenteux
Leur but est de bloquer les altérations de la transmission synaptique excitatrice ou inhibitrice et de limiter la propagation des crises. Ils agissent à différents niveaux : blocage des canaux synaptiques sodium, potassium ou calcium, inhibition de certains acides aminés excitateurs, stimulation d’autres molécules ayant un effet inhibiteur comme l’acide gamma-aminobutyrique (GABA).
Aujourd’hui, 60 à 70 % des patients répondent favorablement aux médicaments. La recherche travaille à la conception de nouvelles molécules plus efficaces ou présentant moins d’effets secondaires (fatigabilité, somnolence, tremblement, troubles psychomoteurs légers, etc.).
Alternatives aux médicaments et pistes pour demain
Dans 30 % des cas, les malades ne répondent pas de manière totale ou satisfaisante au traitement médicamenteux. Un traitement chirurgical peut alors être proposé si la région épileptogène est localisée dans une partie du cerveau qui peut être enlevée sans séquelle neurologique majeure. Seuls des examens approfondis permettent d’évaluer le rapport bénéfice/risque de cette opération aboutissant à l’ablation de la "zone épileptogène".
D’autres techniques chirurgicales palliatives, fondées sur la stimulation électrique cérébrale ou périphérique, peuvent apporter une amélioration s’il y a contrindication chirurgicale. De nouvelles méthodes radiochirurgicales sont en cours de développement.
Des travaux de recherche sont menés dans trois directions : prévoir la survenue des crises épileptiques afin d’adapter le traitement préventif ; développer une compréhension pharmacogénétique précise de la réponse et de la résistance aux traitements ; mettre au point des traitements locaux par application focale de médicaments ou de stimulations cérébrales dans la zone épileptogène.
Pour aller plus loin
Communiqués de presse
Associations de malades (liste non exhaustive)
Sites de référence
► http://www.inserm.fr/
Epilepsie
Dossier réalisé en collaboration avec Patrick Chauvel, unité Inserm 1106 "Institut de neurosciences des systèmes"
L’épilepsie est connue depuis l’Antiquité où elle est décrite dans des textes indiens, grecs et romains. Bien que le terme au singulier reste d’usage courant, il serait plus exact de parler d’épilepsies au pluriel, ou de syndrome épileptique, car le trouble a des causes, des mécanismes et des manifestations divers.
L’épilepsie, une maladie multiforme
On appelle aujourd’hui épilepsie la récurrence spontanée de crises épileptiques qui résultent d’une décharge anormale et simultanée de milliers de neurones. Elle se propage dans le cerveau et produit des symptômes caractéristiques et variables selon l’origine cérébrale et la propagation.
Que se passe-t-il au niveau des neurones ? Les diverses manifestations de la crise épileptique ont pour origine commune un fonctionnement anormal de certains neurones : ceux-ci sont hyperexcitables et synchronisent anormalement leur activité, ce qui provoque une décharge électrique excessive dans les réseaux neuronaux connectés (voir le dossier neurone). On peut imaginer une sorte de "court-circuit" dans le fonctionnement cognitif et/ou le comportement du sujet. Les raisons pour lesquelles les neurones se placent dans un tel état d’oscillation synchrone et pathologique sont encore imparfaitement connues. | © Inserm, E. Eugène Marquage de neurone |
Des symptômes très variables selon la localisation
L’origine de la crise épileptique se situe dans la majorité des cas dans le cortex cérébral. Les décharges peuvent variablement activer les systèmes neuronaux de la motricité, des organisations cognitives, des émotions, des systèmes végétatifs, et même des comportements. La diversité des aires cérébrales concernées explique la grande variété des symptômes.
- Une décharge prenant naissance au niveau du cortex moteur dans la représentation de la main se traduira par un raidissement ou des secousses rythmiques du pouce et des doigts et se propagera vers la racine du bras. Il pourra envahir une moitié du corps, voire les deux côtés selon les circonstances. Mais si la décharge démarre dans la représentation sensitive de la main, le sujet ressentira des sensations anormales dans les doigts (fourmillements, picotements), qui pourront de même s’étendre.
© Inserm, CRICM - Plateau MEG/EEG - Inserm U975
Cortex
- Une décharge dans le cortex auditif ou visuel produira des hallucinations ou illusions auditives ou visuelles, dans le cortex olfactif ou gustatif des hallucinations olfactives ou gustatives (mauvaise odeur ou mauvais goût).
- Lorsqu’elle démarre dans des régions corticales dites "associatives" (qui traitent des informations à un niveau plus complexe), la crise peut engendrer des manifestations plus élaborées comme des sensations de lévitation, des hallucinations de musiques ou de scènes visuelles. ; Dans les régions d’un degré hiérarchique encore supérieur, des hallucinations de mémoire (déjà vu, déjà vécu, réminiscences de souvenirs) ou des productions de langage anormales (jargon) peuvent être produites.
- Les crises du lobe frontal (vaste région du cortex où s’organisent les comportements moteurs, en interaction avec les émotions) peuvent entraîner des gesticulations anormales, répétitives, prenant parfois l’aspect de comportements de fuite et de frayeur.
Lorsque les crises se produisent dans les régions associatives ou envahissent très rapidement de larges territoires, elles entrainent une perte de conscience.
Enfin, lorsque la région en cause est sensorielle, certaines crises peuvent être déclenchées par des stimuli précis, comme des feux clignotants, un écran d’ordinateur qui scintille, des bruits soudains…
Des crises, partielles ou généralisées
L’épilepsie n’est pas une maladie en tant que telle mais le symptôme de nombreuses pathologies du cerveau, et du cortex cérébral en particulier. Il existe des crises dites "partielles" ou "focales", qui sont la conséquence d’une lésion cérébrale, et des crises "généralisées", non lésionnelles, qui impliquent des mécanismes plus largement distribués dans le cerveau, notamment d’origine génétique.
Les lésions en cause dans les crises partielles peuvent être de nature très différente : tumeur cérébrale (gliome), lésion secondaire à une privation d’oxygène, lésion post-hémorragique, post-infectieuse (encéphalite, abcès), post-traumatique, ou consécutive à des anomalies du développement du cortex, à des processus immunologiques, etc… Certaines de ces "lésions" ne sont que l’expression locale d’une anomalie génétique.
Les crises généralisées
Une crise dite "généralisée" ou "Grand Mal" est caractérisée par des manifestations cliniques et électriques bilatérales et symétriques. Cette crise motrice, qui est la plus impressionnante, implique l’ensemble de la musculature squelettique et comporte une perte de conscience et des manifestations végétatives. Une autre forme de crise "généralisée" est "l’absence", encore appelée "Petit Mal". Ces crises se manifestent par une brusque rupture de la conscience qui apparaît comme un arrêt de toute activité pendant quelques secondes. Certains types d’absence sont accompagnés de "myoclonies", des secousses musculaires des racines des membres et de l’axe du corps qui peuvent entrainer une chute. Certaines crises généralisées sont en fait secondaires à la propagation dans le reste du cerveau de crises partielles : ce sont des crises "secondairement généralisées".
Une maladie fréquente, survenant précocement
© Inserm, A. Represa-Bermejo
Epilepsie
L’incidence de l’épilepsie se situe autour de 50 cas pour 100 000 habitants dans les pays développés (OMS, Duncan et al 2006), ce chiffre étant plus élevé chez les enfants et les personnes âgées. Dans les pays moins développés, elle peut dépasser les 100 pour 100 000 en raison du manque d’hygiène, des risques plus importants d’infections à effet secondaire neurologique et des systèmes de soin défaillants. En France, 0,6 à 0,7 % de la population est concernée et dans 75 % des cas, la maladie s’est installée avant 18 ans.
L’évolution la plus redoutée est l’état de mal épileptique qui se manifeste par des crises très longues (plus d’une demi-heure) ou très rapprochées (sans reprise de conscience) pouvant aboutir à des lésions neurologiques et mettant en jeu le pronostic vital.
La durée de vie moyenne d’un patient épileptique est légèrement inférieure à celle de la population générale. Une mortalité accidentelle peut être associée à une crise (noyade, chute, accident) et l’épilepsie peut conduire au décès soudain chez les patients souffrant de crises chroniques non contrôlées. La lésion cérébrale primaire peut aussi être à l’origine d’une évolution fatale (en cas de tumeur cérébrale par exemple).
L’épilepsie présente d’autres comorbidités comme une association plus fréquente que la moyenne avec des dépressions. Du fait des déficits cognitifs qu’elle peut induire (troubles de la mémoire dans les épilepsies temporales et frontales), elle peut avoir des conséquences négatives importantes sur le bien-être, l’insertion socioprofessionnelle et la qualité de vie. Ainsi, la prise en charge des patients épileptiques représente un enjeu de santé publique important.
Des formes rares et précoces d’épilepsie
Il existe de nombreuses pathologies se traduisant par des symptômes épileptiques et se manifestant très tôt. Ainsi, le syndrome de West touche le nourrisson avant un an. Il associe des spasmes à divers troubles du développement psychomoteur. Le syndrome de Lennox-Gastaut se déclare un peu plus tard, entre 2 et 6 ans, avec des absences et des crises toniques (avec raidissement soudain et contraction des muscles). Le syndrome de Dravet (épilepsie myoclonique sévère du nourrisson) apparaît dans les premiers mois de l’existence. Dans certains cas, les convulsions fébriles du bébé sans cause connue (comme une méningite ou d’autres infections) peuvent annoncer la survenue plus tardive d’une épilepsie du lobe temporal.
Plusieurs gènes impliqués dans des formes rares de syndromes épileptiques débutant dans l’enfance ont été identifiés. Mais dans la plupart des cas l’origine et le mécanisme exact des troubles restent inconnus.
Causes et facteurs de risque à l’étude
L’épilepsie est une maladie complexe et multifactorielle : elle associe des terrains génétiques et des facteurs environnementaux. On parle d’épilepsies symptomatiques lorsque les crises sont la conséquence d’une lésion identifiable, comme une tumeur ou un
accident
vasculaire cérébral, et d’épilepsies idiopathiques lorsqu’aucune cause n’est mise en évidence.
Des études génétiques et épigénétiques conduites sur des populations de malades comparées à des populations indemnes d’épilepsie sont en cours : elles devraient permettre à terme d’identifier et de classifier les origines moléculaires des différentes formes d’épilepsie, ainsi que leur évolution lors du développement et du vieillissement du patient. On sait déjà qu’il n’existe pas "un" gène de l’épilepsie mais de nombreuses variations génétiques et épigénétiques formant un terrain de susceptibilité.
On sait aussi que les facteurs de risque varient selon les âges et les sociétés. Les traumatismes crâniens, les infections du système nerveux central et les tumeurs peuvent surgir à tous les âges de la vie. Les troubles cardiovasculaires sont plus fréquents avec l’âge et constituent le facteur de risque le plus courant chez les personnes de plus de 60 ans. Dans les pays en développement, des maladies très répandues comme le paludisme produisent un terrain favorable à l’épilepsie. Le mode de vie a aussi son influence sur la survenue des crises chez les patients prédisposés : le faible taux de calcium et de glucose sanguin, le manque de sommeil, la consommation excessive d’alcool, le stress et les émotions violentes ont pu être statistiquement corrélés à des crises plus fréquentes.
Les progrès dans la classification des maladies neurologiques et psychiatriques permettent aujourd’hui de réaliser que les crises d’épilepsie sont fréquentes chez les autistes et les patients atteints de maladie d’Alzheimer, alors que ce fait était totalement ignoré il y a quelques années.
Les mécanismes neurobiologiques de la crise
Les mécanismes neurobiologiques pouvant conduire à une crise sont nombreux et distincts. Beaucoup d’entre eux sont encore mal compris mais leur action finale commune est l’hyperexcitabilité et l’hypersynchronie d’une population de neurones.
Cette excitation simultanée résulte d’une amplification de la transmission neuronale liée à l’action des acides aminés excitateurs comme l’acide glutamique, ainsi qu’à une altération de la transmission inhibitrice liée à un acide aminé inhibiteur : l’acide gamma-amino-butyrique ou GABA).
Certaines épilepsies sont liées à des mutations génétiques altérant des protéines présentes à la surface des neurones et impliquées dans ces transmissions. Par ailleurs, la répétition des décharges successives lors des crises (embrasement ou "kindling") favorise la pérennisation de l’épilepsie. Le cerveau garde la mémoire des crises par l’activation de certains récepteurs à l’acide glutamique (récepteurs NMDA) propres à activer des signaux qui facilitent les réponses ultérieures.
Le diagnostic
© Inserm, CJF 90-12
Epilepsie
Le diagnostic de l’épilepsie est parfois difficile. Certaines crises rassemblent les symptômes les plus classiques de la maladie. D’autres sont plus difficiles à interpréter et peuvent résulter de troubles divers.
Le diagnostic repose sur un interrogatoire et un examen clinique, associés à l’électro-encéphalographie (EEG) et à l’imagerie cérébrale (IRM). L’interrogatoire et l’examen ont pour objectif de situer avec le plus de précision possible le début, la fréquence, le ressenti et les circonstances des crises. L’EEG permet de détecter des anomalies de grande amplitude qui sont les traces d’une activité neuronale anormale. Certaines mises en condition ayant pour effet de rendre les neurones plus excitables (lumière stroboscopique, privation de sommeil) peuvent faciliter l’émergence de ces anomalies.
La démarche diagnostique a deux objectifs principaux : (i) localiser la région épileptogène par l’EEG et les méthodes dérivées, (ii) rechercher et localiser une lésion responsable de l’épilepsie.
L’électroencéphalogramme, utile au diagnostic
L’électroencéphalographie consiste à enregistrer l’activité électrique cérébrale à la surface du cerveau, grâce à des électrodes. Cette technique permet de reconnaître des anomalies appelées « pointes » ou « pointe-ondes » (selon leur forme sur l’électroencéphalogramme), correspondant à la somme des potentiels excitateurs et inhibiteurs de milliers de neurones. Leur aspect, leur fréquence et leur topographie permettent parfois de caractériser leur signification pathologique et, souvent, leur localisation cérébrale. La vidéo-EEG, alliant l’enregistrement vidéo à l’EEG, met en relation la topographie de la décharge avec les symptômes des crises, donnant accès à l’origine anatomique des crises.
Des traitements essentiellement médicamenteux
Les traitements des épilepsies sont dans la grande majorité des cas, médicamenteux
Leur but est de bloquer les altérations de la transmission synaptique excitatrice ou inhibitrice et de limiter la propagation des crises. Ils agissent à différents niveaux : blocage des canaux synaptiques sodium, potassium ou calcium, inhibition de certains acides aminés excitateurs, stimulation d’autres molécules ayant un effet inhibiteur comme l’acide gamma-aminobutyrique (GABA).
Aujourd’hui, 60 à 70 % des patients répondent favorablement aux médicaments. La recherche travaille à la conception de nouvelles molécules plus efficaces ou présentant moins d’effets secondaires (fatigabilité, somnolence, tremblement, troubles psychomoteurs légers, etc.).
Alternatives aux médicaments et pistes pour demain
Dans 30 % des cas, les malades ne répondent pas de manière totale ou satisfaisante au traitement médicamenteux. Un traitement chirurgical peut alors être proposé si la région épileptogène est localisée dans une partie du cerveau qui peut être enlevée sans séquelle neurologique majeure. Seuls des examens approfondis permettent d’évaluer le rapport bénéfice/risque de cette opération aboutissant à l’ablation de la "zone épileptogène".
D’autres techniques chirurgicales palliatives, fondées sur la stimulation électrique cérébrale ou périphérique, peuvent apporter une amélioration s’il y a contrindication chirurgicale. De nouvelles méthodes radiochirurgicales sont en cours de développement.
Des travaux de recherche sont menés dans trois directions : prévoir la survenue des crises épileptiques afin d’adapter le traitement préventif ; développer une compréhension pharmacogénétique précise de la réponse et de la résistance aux traitements ; mettre au point des traitements locaux par application focale de médicaments ou de stimulations cérébrales dans la zone épileptogène.
Pour aller plus loin
Communiqués de presse
- Epilepsie et troubles cognitifs : une cause commune (24 août 2011)
- Identification d’un "interrupteur" responsable de la transformation d’un cerveau sain en cerveau épileptique (27 juin 2011)
- Un diurétique pour mieux soigner les épilepsies infantiles (24 Mars 2011)
- Troubles du langage : un réseau de protéines en cause (4 novembre 2010)
- Rôle primordial des neurones libérant du GABA dans le développement du cerveau (4 décembre 2009)
- L’activité neuronale dépend de la dynamique des récepteurs présents au niveau de la synapse (11 juin 2009)
- Des signes prédictifs de l'épilepsie, avant les crises ? (27 avril 2009)
- La taurine : clé de la toxicité visuelle d'un anti-épileptique de l'enfant ? (16 février 2009)
Associations de malades (liste non exhaustive)
- Inserm-Associations - la base Inserm Associations
- Epilepsie-France
- AISPACE (Agir, Informer, Sensibiliser le Public pour Améliorer la Connaissance des Epilepsies)
- Fondation française pour la Recherche sur l'épilepsie
Sites de référence
- Haute autorité de santé : La prise en charge de votre épilepsie, vivre avec une épilepsie sévère, 2007
- OMS. Epilepsie : aide-mémoire (janvier 2009)
► http://www.inserm.fr/
Invité- Invité
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